Nouvelles directives de l’ARSF en matière de partage de  patrimoine pour les régimes assujettis à la Loi sur les régimes de  retraite (LRR) de l’Ontario

Nouvelles directives de l’ARSF en matière de partage de patrimoine pour les régimes assujettis à la Loi sur les régimes de retraite (LRR) de l’Ontario

Retraite et avantages sociaux

Numéro 21-21
9 décembre 2021

Le 9 novembre 2021, l’Autorité ontarienne de réglementation des services financiers (ARSF) publiait une directive concernant l’administration des prestations de retraite en cas de rupture du mariage. Cette directive pourrait avoir un impact sur les valeurs qui pourront être partagées entre conjoints lorsque ces derniers ne sont pas résidents de la même province que celle d’enregistrement du régime. Ces lignes directrices ajoutent un degré de complexité à un processus déjà lourd et difficile pour certains.  Les administrateurs devront donc revoir leurs politiques de calcul et d’information aux participants en fonction de cette nouvelle directive s’ils veulent être en mesure d’aider les participants de leur régime à compléter les processus requis en cas de partage, et ce, sans trop de heurts. 

Ligne directrice sur l’administration des prestations de retraite en cas de rupture 
du mariage 

La Loi sur le droit de la famille (LDF) énonce ce qui doit être considéré comme faisant partie des biens familiaux. Dans la très grande majorité des cas, la loi qui s’applique est celle de la province de résidence du couple avant sa séparation. Cette loi est celle qui régira l’évaluation des biens familiaux, dont les avoirs de pension. C’est aussi la loi de cette province qui déterminera le partage des biens. Par ailleurs, lors de la mise en application de ce partage, ce sont les règles de l’autorité législative où la pension a été gagnée qui s’appliquent. Il est fort possible que cette exigence cause de la confusion et des délais dans certains cas. 

Régime relevant d’une seule autorité gouvernementale 

Lorsqu’un régime relève d’une seule autorité, c’est que les lieux de travail des participants du régime sont tous dans une seule et même province. La situation se complique lorsque le régime couvre des participants résidents dans plus d’une province. Dans un premier temps, les droits à pension d’un participant au régime devront être évalués en fonction de la législation en matière de droit de la famille de sa province de résidence. Par contre, lorsque viendra le temps de partager les avoirs pour faire suite à un jugement de la cour ou à une entente entre les parties, pour les régimes couverts par la LRR de l’Ontario, ce partage devra se faire dans les limites et conditions prévues par la législation ontarienne dont est assujettis le régime de retraite, ce qui n’est pas nécessairement la même que celle ayant servi à déterminer la valeur initiale des avoirs relatifs à la pension. 

Prenons le cas d’un couple résident en Alberta dont un des conjoint travail en Ontario et participe à un régime couvert par la LRR de l’Ontario. L’administrateur évalue les droits de ce participant, selon le droit de la famille de l’Alberta à 100 000$ et le jugement ordonne un partage à 50% de la valeur des droits du participant. Avant d’effectuer le partage, l’administrateur du régime enregistré en Ontario doit également évaluer ces droits selon la LRR et ne procéder au partage que dans les limites prévues à cette loi. Si la valeur des droits selon la LRR est de 90 000$ l’administrateur ne sera pas autorisé à transférer le 50 000$ requis puisqu’il ne peut transférer plus de 50% de la valeur évaluée selon la LRR de l’Ontario. Bien que le jugement en Alberta ordonne un transfert de 50 000$, cette ordonnance n’est pas exécutoire en Ontario et l’administrateur sera contraint de limiter le versement à 45 000$. Dans tous les cas, l’administrateur doit se conformer aux dispositions de la loi sur les régimes de retraite qui s’applique au régime c’est-à-dire la LRR pour les régimes enregistrés en Ontario.  

Régime relevant de plus d’une autorité gouvernementale 

L’entente de 2020 sur les régimes relevant de plus d’une autorité gouvernementale est venue préciser que la valeur totale des droits accumulés est déterminée par la loi sur les régimes de retraite à laquelle le participant est assujettie à la date de détermination des droits. Bien qu’il soit possible que le participant ait travaillé dans plus d’une province, ses droits sont déterminés par son dernier lieu de travail. Si cette province est la même que le dernier lieu de résidence du couple, la pension sera évaluée et partagée en vertu des règles relatives au droit de la famille de cette province et l’administration de ce partage se fera selon les limites prévues aux dispositions législatives de cette même province. Par ailleurs, si la dernière province de travail est l’Ontario et que le dernier lieu de résidence du couple est dans une autre province, selon la directive de l’ARSF, la mise en vigueur du partage se fera selon l’autorité législative Ontarienne et donc différente de celle ayant régie le calcul et le partage des droits.  Pour l’administrateur d’un tel régime, cela peut vouloir dire d’évaluer et de procéder au partage des droits des participants selon plusieurs autorités, et ce en regard des différentes provinces de résidence des participants couverts par le régime.

Régime de retraite non assujetti à la LRR de l’Ontario 

La situation est aussi complexe pour un travailleur résidant en Ontario dont le régime n’est pas couvert par la LRR. Dans le cas d’un régime de retraite sous juridiction fédérale, assujetti à la Loi de 1985 sur les normes de prestations de pension (LNPP), l’administrateur se doit de respecter les règles sur le partage en cas de rupture du mariage énoncées dans la LNPP ainsi que celle prévue à la Loi sur le droit de la famille de l’Ontario. Pour les régimes non couverts par la LRR ou toute autre juridiction, la directive donne peu d’informations et d’encadrement. L’ARSF demande à l’administrateur de se conformer à la LRR, « lorsqu’il est raisonnablement possible de le faire » et lui permet d’y apporter les adaptations nécessaires, si cela est requis.  

Communication 

Afin de s’assurer de respecter les limites prévues en cas de partage des pensions, il pourrait être utile, voire nécessaire, pour l’administrateur d’effectuer et de transmettre aux conjoints qui se séparent les calculs de la valeur des droits selon plus d’une législation.  Des problèmes administratifs pourraient survenir si les valeurs sont différentes et qu’elles ne sont pas communiquées dès le début du processus. L’administrateur devra s’assurer que ses procédures en matière de rupture de mariage sont toujours adéquates et répondent à cette nouvelle directive de l’ARSF. Une communication claire des règles et des montants, sera la clé pour éviter non seulement des complications administratives, des coûts au régime, des délais supplémentaires dans les procédures, mais surtout de la frustration de la part des participants.  

Frais d’administration 

Les différentes lois en matière de régime de retraite permettent au régime de charger des frais lors des calculs en cas de rupture de mariage. Différentes raisons dont entre autres, les montants maximums imposés à ces frais, ont fait en sorte que des promoteurs de régimes ont décidé de ne pas charger de frais aux participants. L’arrivée de cette nouvelle directive de l’ARSF est un bon moment pour analyser si la décision prise est toujours pertinente, et ce particulièrement pour un régime couvrant des participants résidant dans plus d’une province. 

Conclusion

Finalement, la ligne directrice émise par l’ARSF vient préciser les normes applicables et les hypothèses à utiliser pour le calcul des avoirs de pension. En outre, la ligne directrice détaille comment le calcul de la valeur à des fins de droit de la famille s’intègre ou non à la nouvelle norme de pratique de l’Institut canadien des actuaires entrée en vigueur le 1er décembre 2020 (norme ICA) concernant le calcul de valeur actualisée des rentes. Une des nouvelles dispositions de la norme ICA s’applique dans le cas où le participant qui a cessé a droit à des subsides de retraite anticipée. La norme exige que la valeur actualisée des rentes soit calculée à l’aide d’une hypothèse de départ à la retraite tenant compte d’une probabilité de 50 % de départ à la date qui donne la valeur actualisée la plus élevée et d’une probabilité de 50 % de départ à la première date à laquelle le participant sera admissible à une prestation de retraite non réduite (l’« hypothèse 50/50 »). La ligne directrice de l’ARSF stipule que l’hypothèse 50/50 ne s’applique pas lors du calcul de la valeur actualisée à des fins de droit de la famille pour les participants actifs puisque la loi prévoit que la valeur doit être équivalente à la moyenne pondérée de la valeur des prestations de retraite accumulées par le participant selon trois scénarios spécifiques quant à l’âge de début de la pension. Il est à noter que cette ligne directrice s’applique aux administrateurs des régimes de retraite qui sont assujettis à la LRR. Sa date d’entrée en vigueur est le 9 novembre 2021 et touche les ordonnances judiciaires, sentences d’arbitrage familial ou contrats familiaux postérieurs au 1er janvier 2012.

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